Découverte d’une nouvelle super-Terre

Dimanche, 20 Décembre 2009 09:39 Stéphane Udry Xavier Bonfils David Charbonneau
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Communiqué de presse ESO 50/09

16 Décembre 2009
Pour diffusion immédiate

Découverte d’une nouvelle super-Terre… au cœur de glace et à l’atmosphère inhospitalière

Les astrophysiciens genevois Mayor et Udry avaient déjà découvert une exoplanète en 2007. [Keystone]

Des astronomes ont découvert la seconde exoplanète de type super-Terre [1] pour laquelle ils ont pu déterminer la masse et le rayon et obtenir ainsi des indications essentielles sur sa structure. Il s’agit également de la première super-Terre connue avec une atmosphère. Cette exoplanète, en orbite autour d’une petite étoile située à seulement 40 années-lumière de la Terre, ouvre ainsi de nouvelles et importantes perspectives dans la quête de mondes habitables. La planète GJ1214b a une masse d’environ six fois celle de la Terre et son cœur est probablement composé en majeure partie de glace d’eau. Sa surface se révèle être très chaude et elle est entourée d’une atmosphère épaisse qui la rend inhospitalière pour la vie telle que nous la connaissons sur Terre.

6 December 2009



ESO PR Photo 50b/09
L’étoile GJ1214


ESO PR Video 50a/09
Vue d’artiste de GJ1214b


ESO PR Video 50b/09
Zoom sur l’étoile GJ1214


ESO PR Video 50c/09
Zoom sur l’étoile GJ1214

Dans l’édition du magazine Nature de cette semaine, une équipe d’astronomes annonce la découverte d’une planète en orbite autour de la très proche étoile de faible masse GJ1214 [2]. Après la récente découverte de la planète CoRoT-7b [3], c’est la deuxième fois que le transit d’une super-Terre a pu être détecté. Un transit se produit quand l’orbite de la planète est alignée avec l’observateur de telle sorte que l’on peut voir la planète passer devant son étoile. Par rapport à la Terre, cette nouvelle planète a une masse environ 6 fois supérieure et un rayon 2,7 fois plus grand. Elle a ainsi une taille comprise entre celle de la Terre et celle des planètes géantes glacées du système solaire, Uranus et Neptune.

Bien que la masse de GJ1214 soit similaire à celle de CoRoT-7b, son rayon est beaucoup plus grand, ce qui laisse supposer que la composition des deux planètes est vraiment différente. Alors que CoRoT-7b a probablement un cœur rocheux couvert de lave, les astronomes pensent que GJ1214b est composée à 75% de glace d’eau et que les 25% restant seraient constitués de fer et de silice.

GJ1214b fait le tour de son étoile en 38 heures à une distance de seulement deux millions de kilomètres – 70 fois plus proche de son étoile que la Terre du Soleil. « Etant si proche de son étoile, sa température en surface doit être d’environ 200 degrés Celsius, ce qui est trop chaud pour que l’eau soit liquide, » déclare David Charbonneau, premier auteur de l’article présentant cette découverte.

En comparant le rayon mesuré pour GJ1214b avec les modèles théoriques de planètes, les astronomes ont trouvé que ce rayon dépasse les prédictions des modèles : il y a quelque chose en plus de la surface solide de la planète qui occulte la lumière de l’étoile – une atmosphère de 200 kilomètres d’épaisseur. « Cette atmosphère est bien plus épaisse que celle de la Terre, aussi la forte pression et l’absence de lumière devraient empêcher toute forme de vie telle que nous la connaissons, » précise David Charbonneau, « mais ces conditions restent très intéressantes car elles peuvent permettre le développement d’une chimie complexe. »

« GJ1214b est trop chaude pour avoir pu garder une atmosphère pendant longtemps. Elle nous offre donc la première opportunité d’étude d’une atmosphère récemment formée, enveloppant un monde en orbite autour d’une autre étoile, » ajoute Xavier Bonfils, un des membres de l’équipe. « De plus, cette planète étant si proche de nous, il sera possible d’étudier son atmosphère, même avec des équipements courants ».

Cette planète a été détectée dans un premier temps comme un objet en transit par le projet MEarth qui observe environ 2000 étoiles de faible masse pour détecter des transits d’exoplanètes [4]. Afin de confirmer la nature planétaire de GJ1214b et obtenir sa masse (en se servant de la méthode dite des vitesses radiales qui utilise l'effet Doppler), les astronomes ont eu besoin de la précision du spectrographe HARPS, installé au foyer du télescope de 3,6 mètres de diamètre de l’ESO à La Silla. Cet  instrument de grande précision, d’une stabilité inégalée, est le meilleur des chasseurs de petites exoplanètes au monde.

« C’est la seconde super-Terre pour laquelle il a été possible d’obtenir la masse et le rayon, nous permettant ainsi de déterminer sa densité et d’en déduire sa structure interne, » ajoute Stéphane Udry, un des co-auteurs de l’article. «  Dans les deux cas, les données obtenues avec HARPS on été essentielles pour caractériser la planète. »

« Les différences dans la composition de ces deux planètes sont utiles pour la quête de mondes habitables, » conclut David Charbonneau. Si les super-Terres en général sont enveloppées par une atmosphère similaire à celle de GJ1214b, elles pourraient bien ne pas être propices au développement de la vie telle que nous la connaissons sur notre planète.

Notes

[1] Une super-Terre est par définition une planète dont la masse est comprise entre une et dix masses terrestres. Une exoplanète est une planète en orbite autour d’une étoile autre que le Soleil.

[2] L’étoile GJ1214 est cinq fois plus petite que notre Soleil et intrinsèquement trois cents fois moins brillante.

[3] CoRoT-7b est l’exoplanète connue la plus petite et à la vitesse orbitale la plus élevée. Elle a une densité sensiblement similaire à celle de la Terre ce qui laisse penser qu’il s’agit d’une planète  rocheuse. Le satellite CoRoT du CNES a dans un premier temps détecté son transit ce qui a permis à HARPS de révéler sa véritable nature (ESO 33/09).

[4] Le projet MEarth utilise une armada de huit petits télescopes, ayant tous un diamètre de 40 cm, installés au sommet du Mont Hopkins, en Arizona aux USA. MEarth recherche des étoiles présentant des variations de luminosité. L’objectif est de détecter une planète qui passe devant son étoile (on appelle cela le transit). Pendant ces mini-éclipses, la planète occulte une petite fraction de la lumière de l’étoile, la rendant ainsi moins lumineuse. La mission Kepler de la NASA utilise également la méthode des transits pour rechercher des planètes de la taille de la Terre autour d’étoiles similaires au Soleil. Toutefois, dans de tels systèmes la baisse de l’intensité lumineuse de l’étoile est si infime qu’une très grande précision est nécessaire pour la détecter, ce qui signifie que de tels mondes ne peuvent être découverts que depuis l’espace. Par contre, une super-Terre passant devant une petite naine rouge produira une diminution de l’intensité lumineuse proportionnellement plus grande et donc un signal plus fort, détectable depuis la Terre.

Plus d’informations

Cette recherche est présentée dans un article publié cette semaine dans Nature (“A Super-Earth Transiting a Nearby Low-Mass Star”, by David Charbonneau et al.).

L’équipe est composée de David Charbonneau, Zachory K. Berta, Jonathan Irwin, Christopher J. Burke, Philip Nutzman, Lars Buchhave, David W. Latham, Ruth A. Murray-Clay, Matthew J. Holman et Emilio E. Falco (Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics, Cambridge, USA), Christophe Lovis, Stéphane Udry, Didier Queloz, Francesco Pepe et Michel Mayor (Observatoire de Genève, Suisse), Xavier Bonfils, Xavier Delfosse et Thierry Forveille (Université Joseph Fourier — Grenoble 1/CNRS, LOAG, Grenoble, France) et Joshua N. Winn (Kavli Institute for Astrophysics and Space Research, MIT, Cambridge, USA).

L’ESO - l’Observatoire Européen Austral - est la première organisation intergouvernementale pour l’astronomie en Europe et l’observatoire astronomique le plus productif au monde. L’ESO est soutenu par 14 pays : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L’ESO conduit d’ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l’astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d’importantes découvertes scientifiques. L’ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l’organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L’ESO gère trois sites d’observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. A Paranal, l’ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l’observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde et VISTA, le plus grand télescope pour les grands relevés. L’ESO est le partenaire européen d’ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L’ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d’un télescope européen géant – l’E-ELT- qui disposera d’un miroir primaire de 42 mètres de diamètre et observera dans le visible et le proche infrarouge. L’E-ELT sera « l’œil tourné vers le ciel » le plus grand au monde.

Quelques précisions sur la participation française

- L’équipe française du LAOG est experte dans la mesure des vitesses radiales et notamment pour les étoiles de faibles masses (naines rouges).
- HARPS (High Accuracy Radial Velocity Planet Searcher), le spectrographe haute résolution pour la recherche d'exoplanètes installé sur le télescope de 3,6 mètres de diamètre de l’ESO à La Silla a été construit par un consortium international piloté par l'Observatoire de Genève et qui comprenait l'Observatoire de Haute Provence (INSU-CNRS – OAMP / France), l'Université de Berne en Suisse, le Service d'Aéronomie (INSU-CNRS / France) et l'ESO.

Liens

Contacts

Stéphane Udry
Geneva University, Switzerland
Phone: +41 22 379 2467
E-mail: stephane.udry (at) unige.ch

Xavier Bonfils
Université Joseph Fourier - Grenoble 1 / CNRS, 
Laboratoire d'Astrophysique de Grenoble (LAOG), France
Phone : +33 47 65 14 215
E-mail: xavier.bonfils (at) obs.ujf-grenoble.fr

David Charbonneau
Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics
Cambridge, USA
Phone: +1 617 496 6515
E-mail: dcharbon (at) cfa.harvard.edu

 

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